"Mémoires d'un jeune garçon", Henry James
Après des lectures pas très intéressantes, j'ai ressenti le besoin de me plonger dans une valeur sûre, un livre écrit par Henry James.
Il s'agit de l'une des deux autobiographies de l'auteur, ce qui m'a intriguée. Ce livre paraît assez fouillis quand on le commence, car on s'attend à une autobiographie avec des événements décrits chronologiquement, mais il s'agit surtout ici de bribes d'impressions, de sensations qui ont éveillé quelque chose chez l'auteur, ce qui fait qu'au début il faut s'accrocher.
Au bout de cinquante pages on comprend qu'on a affaire à un récit différent, à une analyse, une dissection de moments marquants de l'enfance d'Henry James. Vraiment curieux. Très riche, assez intello dans la démarche, il faut suivre son raisonnement par le biais de très longues phrases pour tenter de cerner ce petit rien qui l'a marqué, une impression fugace.
On découvre ainsi le milieu assez gai dans lequel il a baigné tout petit, un milieu aisé du fait d'un héritage d'un grand-père, où il grandit parmi tout un tas d'oncles, de tantes et de cousines et auprès d'un père au tempérament passionné qui avait l'air assez chouette, bref, un petit cocon bien sympathique dénué de soucis matériels.
L'esprit analytique d'Henry James me fait penser à Pirandello. Les écrivains ne sont pas forcément toujours de grands raisonneurs, mais Henry James est quelqu'un qui ressent les choses et arrive à prendre du recul et analyser son ressenti. J'avoue que je ne l'ai pas toujours suivi dans ces auto-analyses, mais ce n'est pas grave, j'ai été captivée par son univers. Je comprends mieux ceux qui le comparent à un artiste peintre. Sa perception est unique, celle d'un grand artiste-observateur-intello.
C'est rare qu'on m'entende rigoler lorsque je lis un roman, mais ça a été le cas ici. Quand il parle par exemple d'un copain qui l'avait entraîné très jeune dans l'idée d'écrire un livre et qu'il décrit comment tous les deux tournaient majestueusement autour du pot ce qui n'empêchait pas son ami de multiplier les efforts pour en organiser la publication, bref, de mettre la charrue avant les boeufs ("Je suis sûr qu'il aurait trouvé à le publier s'il avait pu l'écrire")...
A mon avis, il ne faut pas commencer par cet ouvrage si on n'a rien lu d'Henry James. Je pense que si cela avait été mon premier livre de lui, je n'aurais pas continué, car il est un peu comme Ingmar Bergman en fin de compte, il a un univers très particulier qui peut rebuter. Mais si on s'accroche, comme dans le cas de Pirandello d'ailleurs, ce qu'il raconte vaut toujours le coup.