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La tête à rire
17 août 2015

"L'auteur ! L'auteur !", David Lodge

DSC02988Un livre très chouette sur la vie d'Henry James et le parcours artistique pas toujours très heureux d'un homme de lettres.

David Lodge y parle de l'auteur américain Henry James, qui n'a jamais connu le grand succès de son vivant, et retrace son parcours et ses déceptions. On y découvre ses amitiés littéraires de l'époque, son engagement total dans l'écriture excluant toute vie privée, sa vie mondaine et ses tentatives assez désastreuses de se faire un nom dans le monde du théâtre.

C'est un livre que je conseille à tous ceux qui s'intéressent aux vies des auteurs, aux vocations artistiques. On peut voir que les auteurs dans les années 1880 rencontraient le même genre de difficultés que ceux d'aujourd'hui, la difficulté de se faire connaître, de vendre, l'incompréhension face à la critique. La jalousie d'Henry James envers un ami écrivain (Du Maurier) qui avait pondu un roman pas terrible qui avait remporté un énorme sucès alors que lui n'arrivait pas à susciter de buzz est assez comique aussi.

Ce livre commence par Henry James vieux et affaibli et j'ai été un peu inquiète où tout ça allait mener, mais on enchaîne assez vite sur la vie d'Henry James plus jeune et ses déceptions multiples et j'ai trouvé ça passionnant.

Quelques phrases notées en passant :

"Les directeurs de théâtre et les metteurs en scène sont la race humaine la plus encline à faire traîner les choses en longueur, la plus hésitante, la plus inconsistante que je connaisse." (p. 214)

Sur ses déceptions théâtrales : "Cinq années entières ! Cinq années, avec pour seuls fruits un demi-succès et un échec complet sur la scène, et les multiples ébauches de pièces non représentées [...]. La réécriture sans fin, les innombrables lettres, télégrammes et discussions, les espoirs conçus, anéantis puis ressuscités qui avaient occupé ces cinq ans n'avaient pour finir abouti à rien. La vanité de ces efforts ! Le gâchis !" (p. 357)

"Ecris une pièce de théâtre et tu sauras, mieux que je ne saurais te le dire, qu'une telle épreuve - odieuse, par essence ! - n'est rendue tolérable que si elle aboutit à un grand succès, et de combien de façons l'insuccès peut être dévorant et tragique, une amertume permanente qui s'insinue dans chaque palpitation de la conscience." (p. 378)

Ses réflexions, après avoir écrit pour la scène, de la nécessité de faire un plan pour ses prochains romans : "Lorsqu'on inventait une histoire à mesure qu'on la rédigeait, elle risquait en permanence d'emprunter trop de directions différentes, de passer par la conscience de trop de personnages, de traiter des thèmes trop nombreux pour obtenir une unité et une concentration de l'effet." C'est ce qui avait nui, il devait le reconnaître, à ses deux derniers romans, "La Princesse Casamassima" et "La Muse tragique". Et peut-être était-ce à cause de celà qu'il avait éprouvé la tentation d'adopter le support dramatique, avec ses contraintes formelles inhérentes.

Mais cette réflexion en amena une autre. Et si l'ont appliquait au récit littéraire la méthode qu'il avait employée pour écrire ses pièces de théâtre, à savoir un scénario, le résumé détaillé scène par scène d'une intrigue imaginée.

Dès lors, on aurait une maquette, pour ainsi dire, du roman ou de la nouvelle sous une forme virtuelle; on pourrait prendre la mesure de sa structure d'ensemble, en évaluer l'unité et la symétrie, et procéder aux ajustements nécessaires avant de se lancer dans le processus de rédaction.

Alors, pensa-t-il avec une excitation croissante, le principe dramatique lui-même, celui de la représentation scénique du vécu - "montrer" plutôt que "narrer" l'histoire, par la confrontation et l'interaction des personnages -, ne pourrait-il pas donner à la prose littéraire le genre de vigueur structurelle et d'élégance qui lui manquait si souvent, tout en laissant le romancier libre d'y ajouter la ressource sans prix, refusée au dramaturge, de pouvoir révéler dans toute leur dense complexité les cheminements secrets de la conscience ? (p.381)

La scène page 268 où Henry James assiste à une lecture de sa pièce volontairement saccagée par les comédiens sur ordre du metteur en scène (pour faire comprendre à l'auteur qu'il ne la monterait plus) est à la fois amusante et cruelle.

Bref, un livre bien foutu que j'ai eu grand plaisir à lire. L'admiration de David Lodge pour Henry James est contagieuse et m'a donné envie de m'intéresser davantage à ses écrits. Je viens d'acheter deux romans courts de lui, La bête dans la jungle et Le motif dans le tapis.

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Commentaires
C
Dans le livre de Lodge, il mentionne plusieurs pièces : "L'Américain", "Mrs Vibert" et "Guy Domville". J'aimerais bien les lire, mais bon, ça a l'air mal barré si on n'en parle plus du tout.<br /> <br /> <br /> <br /> Je viens de lire "La bête dans la jungle" d'Henry James, je ne connais pas l'adaptation qu'en a faite Duras, mais je suis intriguée de voir le résultat, car c'est un texte assez abstrait, j'ai trouvé.<br /> <br /> <br /> <br /> Je conseille vraiment ce livre de Lodge à tous ceux qui s'intéressent à l'écriture, car c'est rare d'avoir les pensées brutes d'un auteur, de partager ses moments de doute, etc. Et David Lodge lui rend hommage avec humour, donc c'est assez amusant à lire.<br /> <br /> <br /> <br /> J'ai acheté ce bouquin à cause du titre, sans savoir de quoi il parlait. Bonne découverte donc.
O
Mais ce post, très intéressant, donne envie de lire le livre de Lodge...
O
Il semble que James ait peu écrit pour le théâtre...Une seule pièce, d'après Wiki.<br /> <br /> Que les tentatives d'écriture dramatique l'ait inspiré et orienté quant à ses nouvelles et romans...sans doute.<br /> <br /> Ce qu'on joue de James, "La bête dans la jungle", notamment, est le fruit d'une adaptation de Marguerite Duras.

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