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La tête à rire
29 novembre 2012

"Laterna magica"

DSC02577Laterna magica d'Ingmar Bergman, un livre publié dans la collection Folio (numéro 2238).

J'aime lire des biographies d'auteurs, savoir comment ils ont commencé, ce qui les a poussés à écrire des scénarios et pièces de théâtre, à dédier leur vie à leur passion.

En lisant ce livre, je me suis dit que si j'avais eu la chance de côtoyer Ingmar Bergman lors d'un tournage par exemple, je n'aurais pas été très à l'aise. Lorsque j'ai lu la biographie de Jean Anouilh, Anouilh, un auteur "inconsolable et gai", je me suis dit que j'aurais bien aimé sa compagnie, que Jean Anouilh aurait été approchable, qu'on aurait même pu discuter théâtre. En lisant celle d'Eric Lax sur Woody Allen, pareil. Woody Allen ne prendrait peut-être pas le temps de me parler comme l'aurait fait Jean Anouilh, mais au moins il serait possible de l'étudier de loin. Ingmar Bergman en revanche, je crois bien qu'il m'aurait foutu les jetons et que j'aurais été me réfugier dans la pièce d'à côté.

Pas besoin de lire une biographie d'Ingmar Bergman pour se rendre compte que c'était un homme complexe. En voyant un de ses films, on le sait. Un homme torturé, en proie à de sacrés coups de gueule, à tout foutre en l'air si quelque chose ne lui plaisait pas (on ne devait pas toujours rigoler sur les tournages). Mais un homme intelligent, ce qui est très clair aussi lorsqu'on voit ses œuvres, lucide et qui revient honnêtement sur ses emportements, ses défauts.

Ce que j'ai trouvé étonnant, c'est sa vie privée, sa capacité à passer de femme en femme. Il tombait amoureux, avait des enfants et au bout de quelques années, hop, il n'était plus satisfait, alors on virait tout, trouvait une autre femme à laquelle il lui faisait aussi des enfants... Il avait acheté un studio pour ses périodes de célibataire et il repartait à chaque fois à zéro. Très nomade et détaché, froid dans sa manière de faire, il semblait perdre contact avec ses gosses.

Ce qui est surprenant aussi, c'est que malgré sa vie personnelle plutôt olé olé, il avait une capacité de travail incroyable. Il montait une dizaine de pièces, s'engageait à faire des films par ci, écrire des scénarios par là... Epoustouflant.

Dans ce livre, on se rend compte qu'il a fait pas mal de bourdes, que ses mises en scène et scénarios n'ont pas toujours rencontré leur public. Il revient honnêtement sur ses textes pas terribles, ses mises en scène décevantes. Il en a parfois pris plein la figure, comme le montre cette critique d'Olof Lagercrantz après la sortie du film Sourires d'une nuit d'été : "L'imagination morbide d'un adolescent couvert de furoncles, les rêves insolents d'un cœur immature, un mépris sans bornes pour la vérité artistique et humaine, voilà quels sont les ressorts puissants qui ont donné naissance à cette "comédie". J'ai honte de l'avoir vue." (Ouille !)

Un livre très bien écrit, à la structure non rigide où il fait part de ses angoisses, de ses rêves un peu inquiétants, tout comme ses expériences terrifiantes étant enfant, lorsqu'il s'est retrouvé par exemple enfermé toute une soirée dans une morgue. Il évoque aussi son éducation stricte, ses parents dépassés par les événements et avec lesquels il a coupé un moment les ponts : une sœur enceinte hors mariage, un frère qui a fait une tentative de suicide et lui qui est parti.

J'ai souri (pourtant ce n'est pas drôle) lorsqu'il fait référence à une scène de rupture avec l'une de ses épouses et qu'il nous renvoie pour en savoir plus à l'un de ses films. "Celui que ça intéresse peut suivre notre entretien (à savoir la scène de rupture entre lui et son épouse Ellen) dans la troisième partie de Scènes de la vie conjugale". Pour la description d'une chambre un peu déprimante d'un hôtel parisien dans lequel il était descendu, "Pour de plus amples informations, je renvoie le lecteur à la chambre des amants dans Le Silence".

C'est assez curieux, il rêvait souvent d'une ville, qui ressemblait un peu à Berlin. Il a essayé trois fois de lui donner forme dans ses créations.

Aucune improvisation en ce qui le concerne : "Le rythme de mes films, je le conçois en écrivant le scénario, à ma table de travail, et il naît devant la caméra. Toute forme d'improvisation m'est étrangère. S'il m'arrive parfois d'être obligé de prendre des décisions sans avoir le temps de réfléchir, je transpire et je me fige de peur. Faire un film, c'est pour moi planifier une illusion dans le moindre détail, c'est le reflet d'une réalité qui, au fur et à mesure que s'écoule ma vie, me paraît elle-même de plus en plus illusoire.

Encore un passage que j'ai noté (et je suis tout à fait d'accord) : "Les services religieux et le mauvais théâtre sont ce qu'il existe de plus long au monde. S'il t'arrive de trouver que la vie passe trop vite, va à l'église ou au théâtre. Alors le temps s'arrête, tu crois que ta montre ne marche plus."

Bref, Ingmar Bergman était un sacré personnage.

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Commentaires
L
Merci Gérard !<br /> <br /> <br /> <br /> Je n'ai rien lu sur Chaplin ou Lubitsch (j'aimerais bien lire quelque chose sur ce dernier, je vais voir ce qu'il a écrit), mais j'ai quelque part sur mes étagères deux biographies en anglais "On Sunset Boulevard, the life and times of Billy Wilder" (une biographie de 700 pages qui va un peu trop dans le détail et que je n'ai pas su finir) et "Between flops, a biography of Preston Sturges", que je vais bientôt commencer.<br /> <br /> <br /> <br /> Je n'ai pas entendu parler des mémoires de Saturnin Fabre.<br /> <br /> <br /> <br /> C'est tout un art d'écrire une biographie, mais quand c'est bien fait, je trouve ça passionnant à lire.<br /> <br /> <br /> <br /> A plus tard,<br /> <br /> Christine
O
Je salue ta persévérance dans la tenue (et bonne tenue !) de ce blog. <br /> <br /> Ce que tu nous racontes sur la bio de Bergman donne envie effectivement de le lire.<br /> <br /> Bravo pour ce texte du jour, très vivant, ...et enlevé.<br /> <br /> <br /> <br /> En matière de bio, j'ai surtout lu, jeune, celle de Chaplin, où, à part au début, il ne livre pas grand-chose sur sa façon de travailler. Celle de Lubitsch ainsi que celle de Billy Wilder. Ah j'oublais, mais juste pour la plasisir, les mémoires de l'ineffable Saturnin Fabre, excentrique acteur...<br /> <br /> Il y a souvent, c'est sûr, matière à enseignement, au-delà de l'aspect anecdotique de la vie de tel ou tel.

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